Chronique, calligramme ou explication sur son oeuvre : les lettres de Gaston Chaissac témoignent au jour le jour de la perpétuelle évolution de son travail. Un blog avant l'heure qui nous renseigne sur son parcours hors du commun.

La trajectoire biographique de Gaston Chaissac et son oeuvre sont indéfectiblement liées. L'artiste, au travers ses recherches, n'a eu de cesse que de revisiter ses souvenirs d'enfant, son expérience, ses savoir-faire et ses savoir-être. Au lieu de tenter de s'approprier un lexique en conformité avec l' académisme artistique, il a su utiliser son matériau biographique pour explorer  son propre langage pictural et littéraire.  

L'écriture de la biographie de Gaston Chaissac n'est pas aisée. Gaston Chaissac est né dans un milieu et à une époque où peu de souvenirs étaient conservés.  Le travail de chercheur est de reconstituer les quelques traces qui donneront une trajectoire. Ce travail est alimenté par deux sources principales:

- les témoignages précieux de ceux qui l'ont croisé ou bien connu, sachant que parfois, la collision entre  la notoriété posthume et les souvenirs est inévitable...

- La correspondance: les échanges épistolaires entre Gaston Chaissac et ses interlocteurs qui nous renseigne sur les évenements, l'avancée des oeuvres, les rencontres. Confronter les lettres envoyées aux lettres reçues sont également un bon indicateur de la considération dont il était l'objet. Nous pouvons ainsi reconstituer des réseaux de connaissances, des cercles d'influence qui éclairent judicieusement sur le positionnement de Gaston Chaissac dans le champ artistique.

-Le fond du Centre de Documentation et de Recherche Gaston Chaissac qui est une association située dans les locaux du Musée de l’Abbaye Sainte-Croix aux Sables d’ Olonne. Y sont rassemblés articles, livres, lettres, archives.

 

Benjamin Péret, l'homme du point du jour, in Gilles Ehrmann, les inspirés et leurs demeures, Paris, le Temps, 1962.


Repères biographiques de la vie de Gaston Chaissac


1910- Naissance de Gaston Chaissac, fils d’artisan cordonnier à Avallon.

1923- Il cesse sa scolarité avant son certificat d’étude et multiplie les apprentissages en vain.

1927-1936 Instabilité et errance. Il ne parvient pas à trouver du travail. Sa santé est fragile. Après le décès de sa mère et la tentative désespérée de son frère et de sa sœur pour l’aider, il se trouve dans une situation très précaire.

1937- Dans l’immeuble de son frère, il rencontre un couple d’artistes, ami de Picasso, Schwitters, Arp et Delaunay, les Freundlich qui lui ouvrent leur atelier et l’initient au dessin et à la peinture. Ils lui donnent confiance. Sur des petits formats, il esquisse des dessins naïfs et des formes imbriquées à l’encre de chine. La même année, démuni, il demande à être pris en charge par l’hospice de Nanterre. Des médecins le protègent et l’incitent à dessiner en lui fournissant du matériel.

1938-1941- les Freundlich lui organisent sa 1ère exposition personnelle. leur entourage lui achète  des œuvres et l’encourage. Il est soigné dans un sanatorium puis part en convalescence à la cité sanitaire de Clairvivre en Dordogne. Il participe néanmoins au salon des indépendants et débute une correspondance avec André Lhote.

1942- Il apprend qu’il va être père. Il part à Saint-Rémy de Provence où Albert Gleizes lui a trouvé du travail chez un bourrelier. Il fréquente le milieu artistique et littéraire autour du peintre cubiste. Cet autodidacte est très stimulé mais ne s’y  sent pas à l’aise. Il quitte Saint-Rémy pour rejoindre sa future épouse à Vix en Vendée

1943-1945- Son épouse, Camille est nommée  institutrice à l'école publique de Boulogne dans le bocage vendéen en septembre. Chaissac met en relation l’écrit et le peint. Il invente des contes dont les personnages deviennent des dessins. Il s’occupe de la maison et de leur fille pendant que Camille fait la classe. Il reste inquiet pour son avenir.


Il participe à de nombreux salons parisiens. Raymond Queneau le remarque :  ils correspondent.


1946-1949-  Début de la correspondance avec Jean Dubuffet, grâce à Jean Paulhan. Après la fermeture de l'école de Boulogne en 1948, les Chaissac s'installent à Sainte-Florence de l'Oie où Camille est nommée.

Il expose au Salon des réalités nouvelles au musée d’art moderne avec Picabia, Magnelli, Herbin, Leppien, Magnelli, Picabia, Arp, Bryen, Delaunay, Freundlich, Gleizes, Gorin.

Le cercle Gallimard contribue à lui organiser une exposition personnelle. Sa timidité dans l’utilisation de matériaux  va s’effacer avec sa conscience d’être véritablement artiste. L’expérience de l’art brut lui permet de trouver de nouvelles voies d’expérimentation. Ses travaux sont exposés dans l’art brut préféré aux arts culturels, dans le sous-sol de la galerie  Drouin Le groupe COBRA découvrent les écrits de Chaissac. Il participe à des revues de littérature prolétarienne.

1951- Parution d’un recueil de lettres envoyées à Paulhan, Gallimard, L’Anselme et Dubuffet : Hippobosque au bocage  chez Gallimard. Les publications se multiplient en particulier dans la N.N.R.F. de Paulhan.

1952-1956- Introduction de l’écriture dans ses huiles. Puis, il  s’intéresse au collage et aux objets de rebut qu’il métamorphose.


Robert Doisneau vient le photographier en Vendée. Dubuffet l’invite à venir travailler dans son atelier de Vence. 


1957-1961-  Isolé, c’est grâce aux échanges épistolaires avec ses interlocuteurs : artistes, écrivains, journalistes, critiques d’art qu’il maintient la communication et la stimulation. Il agrandit ses supports et se dirige simultanément vers l’abstraction et les totems de bois peint. Les galeries d'Iris Clert et de Pagani à Milan l'exposent régulièrement. En 1961, l'école de Sainte-Florence ferme à son tour, les Chaissac reviennent s'installer à Vix dans le marais.

1962-Il fait la couverture du prestigieux livre de Gilles Ehrmann, Les inspirés et leurs demeures avec des textes  d’André Breton et de Benjamin Peret.

1963- Il expose considérablement et sa notoriété devient internationale mais il exprime beaucoup de désarroi,  de solitude et d’incompréhension. Sa santé décline.

1964- Il décède le 7 novembre à la Roche sur Yon en Vendée, à la suite d’une hémiplégie cérébrale
 

Autobiographie est-elle biographie?

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« Ceux d’avant moi reçurent encore une éducation sévère mais nos autres nous étions des petits enfants pendant la guerre de 1914-1918 nous n’avions nos pères, occupés aux armes, nos mères à l’atelier et nous poussions librement, très à l’abandon, cultivant nos instincts et devions rester des instinctifs. »


Lettre de Chaissac à Lanoë, 15 juillet 1949, collection particulière.

 

10 ans à Avallon, Yonne

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« Vers  quinze ans, je m’intéressais à la caricature et j’en fis. Plus tard, je commençais à faire de petits tableaux en m’inspirant d’images représentant la petite Sainte Thérèse de Lisieux puis d’images que les fabricants de camembert collent sur leurs boîtes de camembert.. »

 

 

Lettre de Gaston Chaissac à Joseph Bonnenfant, 1946, collection particulière.

Jeune homme à Villapourçon, Nièvre

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«J’écris des lettres, pas comme on fait d’habitude, une lettre tous les deux ou trois mois. Quand je commence à écrire à quelqu’un, je le fais tous les jours, parfois plusieurs fois dans la même journée, trois semaines, un mois; je m’arrête un moment, puis je recommence, si j’agace mon correspondant, il jette mes lettres au panier, si je l’intéresse...»

 

Gaston Chaissac in ma route d’Aquitaine, Raymond Dumay, 1948

1952, Sainte-Florence de l'Oie, Vendée

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Quoiqu’il en soit , je supplée comme je peux à l’absence de monuments grandioses pour donner des chances à d’infimes évènements de ne pas tomber dans l’oubli. »

 
 
Lettre de Gaston Chaissac à Pierre Boujut, 30 avril 1952 in Lettres du morvandiau en blouse boquine à Pierre et Michel Boujut, Bassac, Plein Chant, Type-Type,1998, 199 p., p. 29.           

1957, Sainte-Florence de l'Oie, Vendée

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« Cinq de mes plus récents (totems) sont au moins aussi haut que moi et en comptant les petits j’en ai au moins une quarantaine. Quelle armée!  Et où même les grands dépendeurs d’andouille sont représentés. C’est à s’en croire le jouet d’une hallucination tellement ils sont affolants et d’ici qu’ils se fasse classer malsains il n’y a pas loin. »

Lettre à Iris Clert, s.d., (1961), M.N.A.M.,publiée dans les Cahiers du Musée National d’Art Moderne, n°5, 1980, p.442

 

 

1958, Sainte-Florence de l'Oie, Vendée

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Si ce que l’on appelle mon cas déroute c’est parce qu’on ne pense pas que de peindre  change la mentalité, instruit, etc. Et ne doit-on pas dans la mesure du possible éviter de dérouter. »

 

 

Lettre de Chaissac à Paulhan, 5 fevrier 1951,   in Chronologie , Daniel Abadie,  catalogue d’exposition Gaston Chaissac, Galerie nationale du Jeu de Paume, Gand, 2000, 387 p. , p. 340.

 

1962, à Vix, Vendée

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